MAURICE VACHEROT (1891-1978)
-PREMIERE MULTIPLICATION MAITRISEE DU PHALAENOPSIS-
 
     Fils d'Henri Vacherot (1862-1945) horticulteur à Boissy-Saint-léger.
     La culture des orchidées* remplaçait peu à peu celle des œillets, des nephrolepis, des bégonias et d'autres plantes ornementales chez Vacherot & Lecoufle lorsque Maurice Vacherot entra dans la société en 1920. Si le catalogue d'Henri Vacherot de 1894 mentionnait sur une seule page une trentaine d'orchidées dont Phalaenopsis amabilis et Phalaenopsis schilleriana, celui de la Société Horticole Henri Vacherot et Lecoufle gendre de 1914 proposait des orchidées sur une dizaine de pages et sur sa carte de visite Henri Vacherot se présentait comme Dianthiste**-Orchidéiste. Entre temps, les fameuses inondations de 1910 étaient passées par là obligeant l'orchidéiste Auguste Marcoz à déménager en barques ses serres situées à côté de la gare de Villeneuve Saint Georges et à abriter ses plantes chez Henri Vacherot. En remerciement Marcoz avait laissé à Boissy une partie de sa collection.
     La première tâche de Maurice Vacherot consiste à s'occuper des comptes de la société et du courrier mais il prend bientôt en charge la multiplication des orchidées dans une petite serre dédiée adossée aux grandes serres de culture. Les premiers semis sont effectués sur des poupées de sphagnum*** puis le laboratoire de culture in vitro se développe avec l'aide du Docteur Jean Gratiot qui avait travaillé avec Noël Bernard et créait lui-même des hybrides. On lui doit entre autres le Phalaenopsis x Gilles Gratiot (aphrodite x amabilis) et le Phalaenopsis x Souvenir de Ernest Gratiot (aphrodite x Gilles Gratiot) et aussi un excellent livre publié en 1934, Les Orchidées, avec un important chapitre consacré à la multiplication. Dès 1922 des germinations asymbiotiques sont signalées dans l'établissement (annales des sciences naturelles-1922).
     Maurice Vacherot a été le premier à maitriser la multiplication des phalaenopsis et à produire des quantités significatives de plantes car depuis les premiers succès de Veitch en 1886, les semeurs n'obtenaient au mieux que quelques dizaines de plantes et plus d'un semis ne donnait qu'une demi douzaine d'individus. Le secret consistait à repiquer régulièrement les plantules, à les changer fréquemment de flacon.
     Les premiers hybrides enregistrés sont :
          Phalaenopsis Elisabethae (amabilis x rimestadiana)**** en 1927
          Phalaenopsis Versailles (rimestadiana x sanderiana) en 1929
          Phalaenopsis Grand Condé (sanderiana x schilleriana) en 1929
          Phalaenopsis Alger (aphrodite x sanderiana) en 1930
          Phalaenopsis Fontainebleau (schilleriana x Wiganiae) en 1930
          Phalaenopsis Lutèce (aphrodite x wiganiae) en 1930
          Phalaenopsis Jeanne d'Arc (Gilles Gratiot x rimestadiana) en 1931
 Phalaenopsis Grand Condé (sanderiana x schilleriana) aux établissement Flandria à Bruges en 1935
 
Phalaenopsis Elisabethae ( amabilis x rimestadiana) Voir description
Phalaenopsis Gilles Gratiot (aphrodite x rimestadiana)
     Pendant une dizaine d'années l'établissement Vacherot & Lecoufle a su conserver une avance significative grâce à ce procédé. Il faut attendre 1935 pour que des établissements étasuniens proposent leurs premiers hybrides (Armacost, Duke Farm), souvent réalisés à partir d'hybrides français. Ainsi, Phalaenopsis Doris qui est le premier hybride que l'on peut qualifier de moderne a été obtenu Par Duke Farm en croisant Phalaenopsis Elisabethae par Phalaenopsis Katherine Siegwart (obtenu par John Slotter) lui même issu du Phalaenopsis Gilles Gratiot. Un documentaire disponible sur le site de l'INA détaille la culture des orchidées en 1930 chez Vacherot & Lecoufle. Une large part est consacré à la multiplication in vitro des orchidées et détaille la technique adoptée à l'époque, à savoir le semis effectué sur un milieu gélosé simple, puis la mise en culture du champignon endophyte et enfin la mise en contact des plantules et du champignon pour réaliser la symbiose. Le film se termine par d'autres étapes de la culture et quelques vues des serres. En cas de difficultés le film est visible à cette adresse :https://www.youtube.com/watch?v=Mvz3VgG-suo



 
     Si Maurice Vacherot est le créateur de plusieurs hybrides importants de Phalaenopsis il est aussi l'obtenteur du Dendrobium x Pompadour (Dendrobium Louis Blériot x Dendrobium phalaenopsis) à l'origine des cultures intensives de Dendrobium pour la fleur coupée dans le sud-est asiatique. Son laboratoire a également créé de nombreux hybrides de Cattleya, de Cymbidium, de Dendrobium, d'Oncidium, de Paphiopedilum etc. Après guerre, entrant à son tour dans la société Vacherot & Lecoufle, Michel Vacherot secondera son père Maurice aux serres et au laboratoire.
    
Maurice Vacherot est l'auteur de deux ouvrages sur les orchidées. En 1953 il fait paraître Les Orchidées chez Baillière et en 1957 Charme et Diversité des Orchidées chez le même éditeur. Il est l'auteur de plusieurs articles dans la Revue Horticole et d'autres publications.
     Culture des Phalaenopsis chez Vacherot et Lecoufle dans les années 1930. Les plantes étaient simplement cultivées dans des pots ajourés suspendus au-dessus d'un bassin servant à recueillir l'eau de pluie. Ci-dessus une serre de Phalaenopsis schilleriana de semis. Les phalaenopsis émettaient de nombreuses racines pendantes au-dessous des pots ; elles étaient pulvérisées chaque matin avec une seringue à piston même en hiver en raison de la déshydratation provoquée par les tuyaux de chauffage qui se trouvaient à un niveau inférieur.
     L'arrosage n'était pas confié à tout le monde. L'apprentissage d'un arrosage correct demandait plusieurs mois, car les plantes étaient mouillées pot par pot et il fallait éviter de mettre de l'eau sur le compost des plantes demeurées humides depuis l'arrosage précédent (l'aspect du compost permet de distinguer la plante qui a besoin d'eau de celle qui peut attendre la mouille suivante). L'unique procédé consistait à se servir d'arrosoirs de 3 litres munis d'un tube d'une cinquantaine de centimètres de longueur au bout duquel s'emboitait une pomme plus ou moins fine.On puisait l'eau de pluie sous les tablettes des serres. Les toutes jeunes plantes étaient arrosées avec une pomme percée de trous très réduits. Le sol était garni de mâchefer de façon à augmenter les surfaces d'évaporation et l'humidité de l'air. En période chaude d'été un léger bassinage était passé sur les plantes en avançant assez rapidement.
Phalaenopsis hybride illustrant le guide de culture édité par Vacherot & Lecoufle en 1936
Description de Phalaenopsis Elisabethae lors de sa première présentation à la Socété Nationale d'Horticulture en juillet 1927. Ce métis se retrouve dans la généalogie de la plupart des hybrides modernes, blancs ou de couleur.
 
      * Il est difficile de dater précisément le début de la culture des orchidées à Boissy Saint léger mais en 1894, Henri Vacherot présentait des plantes d'Oncidium alexandrae (Odontoglossum crispum) à une séance de la société Nationale d'Horticulture de France et dans le même temps son catalogue présentait une sélection d'orchidées. Auparavant les plantes présentées aux séances de la société depuis 1889 étaient des cyclamens ou des bégonias. L'établissement avait été fondé en 1886.

     ** Dès 1898 Henri Vacherot avait développé une sélection d'œillets qui faisait la renommée de son établissement. Ces fleurs 'monumentales' pour reprendre les termes d'un article de La Revue Horticole de 1898, ornaient alors la boutonnière des élégants ou étaient simplement utilisées pour la confection de bouquets.

     *** Ces poupées étaient faites d'une poignée de sphagnum enrobé dans une mousseline. Elles étaient placées sur des pots de 8 cm. de diamètre, la partie lisse et bombée sur le dessus. Des racines aériennes du genre correspondant aux graines à semer étaient coupées par longueur de 1 à 2 cm pour être déposées à raison de 3 sur chaque poupée, placées en petite serre chaude et humide, mises sous cloches de verre sur des terrines spéciales ayant sur leur pourtour une petite gouttière remplie d'eau pour empêcher l'accès aux insectes. Une boule coiffait le sommet de la cloche, de façon à pouvoir la manipuler. Cette boule avait en son centre un trou d'aération. Une mousseline en toile fine recouvrait ce trou pour empêcher l'entrée des insectes. Le mycélium se développait sur les poupées dans un délai de 2 à 3 semaines. Les racines étaient enlevées et le semis pratiqué de la sorte réussissait parfois fort bien.

      **** Phalaenopsis rimestadiana est un synonyme de Phalaenopsis amabilis, le Phalaenopsis Elisabethae n'est donc au mieux qu'un "métis". Un autre hybride, Phalaenopsis Elizabethae, déclaré par Charlesworth Ltd. en 1933, a été accepté. Ce n'est pourtant que l'inverse du croisement de Phalaenopsis Elisabethae, c'est-à-dire Phalaenopsis rimestadiana x Phalaenopsis amabilis. Ce tour de passe-passe n'est plus accepté actuellement.
 
Œillet " Le Colosse " diamètre de la fleur 15 cm

Article illustré de Maurice Vacherot sur les Phalaenopsis et leur culture. Revue Horticole 1934
 
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